•  Un texte pastiché sur l'incipit du Dernier jour d'un condamné de Victor Hugo 

     

    Seule au monde 

    Hospice des délaissés

    Vas, Sors de ma vie, n y reviens plus !

    Voilà un mois que ces mots retentissent jusqu'au tréfonds de mon être. Leur écho fatal s’émiette en bris pour occire mon âme. Toujours seule avec lui, vulnérable de sa brutalité, tressaillisse d’angoisse sous son tumulte qui suffoque ma solitude.

     

    Autrefois, je m’en souviens comme si c’était hier, j’étais entourée de mes biens aimés. J’étais jeune et  je foisonnais de vitalité et de passion. Je m’amusais à faire de mon mieux pour le bonheur de ma famille. Je m’occupais passionnément de mes enfants, de mon mari, avec qui j’avais tissé d’innombrables rêves éveillés. Tout s’est écroulé comme un gigantesque château de sable piétiné par l’usure due à l’âge. Toute une vie de persévérance, d’endurance et de sacrifice devient éphémère. Je me croyais être reine mais d’un chimérique empire qui s’avère déchu.

     

    Maintenant, vieille et malade, je me trouve chassée de chez-moi, jetée dans la rue comme une fleur fanée. Seule à me battre pour survivre dans ce monde immonde. Un simple numéro inconnu dans cet hospice. Moi qui jouissais d’une considération éminente, me voici,   sans famille, sans abri. Mon cœur pleure de chagrin. Mon corps languit dans l’amertume. Enseveli dans le drap comme si dans le linceul de la vie.  Éparpillé, mon esprit a toujours l’air de planer. Il oscille entre cette réalité injuste, vexante et cette cacophonie sans bruit de ces mots que j’essaie vainement d’éviter : sors de ma vie, n’y reviens plus !

    L’ampleur de leur résonance est toujours là. Un vampire qui suce  mon présent. Essoufflée, dépouillée de mes forces, endormie ou éveillée, Jour et nuit, je  me vois dans mon lit comme si sur un radeau flottant au large de ces hallucinations démesurées, perverses, paranoïaques. Elles subjuguent au point qu'elles avalent la lumière autour de moi, m’aveuglent, me clivent par des leurres omniprésents à la fois dans mon esprit inextricable et dans ma pièce lugubre. Je n’arrive plus à me contrôler quand  j’entends une voix qui m’éveille en sursaut : réveillez-vous, vous êtes en retard !

     

     

                                                                           

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